Une expérience comme nulle autre – Le Masters
Par Pierre-Olivier Beaudry
C’est un matin gris de mars. Il ne fait probablement pas très beau dehors mais une journée bien spéciale est sur le point d’arriver. Mon téléphone sonne, c’est Pascal Garneau! Qu’est-ce qu’un joueur top 100 mondial peut bien me vouloir ce matin?
Je décroche le téléphone et sa voix super enthousiaste me salue! Comment vas-tu P.O.? Je t’appelle parce que j’avais une proposition de dernière minute à te faire. Serais-tu intéressé de venir en voyage de golf dans 2 semaine et assister au Masters? Je sais que c’est pas mal dernière minute mais j’ai une place de libre et j’ai pensé à toi! Tu connais tous les membres du groupe qui part.
Après une longue délibération d’environ 2 minutes, j’accepte l’invitation qui m’est lancée! Inutile de vous dire que j’étais très excité de pouvoir me joindre au groupe et de réaliser le rêve de plusieurs golfeurs, fouler le parcours d’Augusta National et voir en personne le fameux tournoi des Maîtres.
Arrêt #1 : Pinehurst
Le départ est tôt le matin à Montréal, il ne fait pas chaud! Quelques petits espressos chez Vito et on est parti. L’atmosphère est fébrile, les gars sont motivés de rouler pendant les 18 prochaines heures en direction de Pinehurst, notre premier arrêt. Je ne pense pas que Pinehurst a besoin d’une présentation, ce mythique terrain a accueilli plusieurs tournois d’envergure dont le U.S. Open il y a quelques années. Le parcours #2 est reconnu pour être l’un des plus difficiles aux États-Unis. Pour pouvoir y jouer, il faut dormir sur le complexe et débourser la maigre somme de 400$ américains. On choisit de passer notre tour. 400$ pour jouer 87 si tout va bien, non merci.
Ceci ne nous a pas empêché de profiter de l’endroit. Le putting green est accessible au public et laissez-moi vous dire que c’est de loin le putting green le plus grand que j’ai vu de ma vie. Tellement qu’on y propose un mini-putt de 18 trous gratuit sur le putting green. Une normale 36 rocambolesque. On vous remet même une petite carte et un crayon pour noter nos pointages. Si vous jouez la normale, chapeau. Il y a aussi juste à côté le terrain exécutif le ‘Craddle’ qui propose un parcours de normale 3 également accessible à tous. Je recommande fortement d’ajouter cet endroit à vos destinations futures.
Au travers de tout ça, on joue aussi quelques rondes de golf sur de beaux parcours de la Caroline puis on lève l’encre vers notre deuxième stop.
Arrêt #2 : Aiken S.C., ‘Home of Kevin Kisner’
Les choses étant ce qu’elles sont lorsqu’un tournoi de l’envergure du Masters se déroule, les prix des hôtels à Augusta sont extrêmement élevés. On loue donc une petite maison en Caroline du Sud à environ 45 minutes d’Augusta en Géorgie. La ville se nomme Aiken. Kevin Kisner est originaire de l’endroit et est qualifié pour le Masters de 2022 en respect des critères 16 et 18, lui qui a gagné son 4e tournoi du PGA en 2022 au championnat Wyndham et qui était parmi le top 50 mondial à la fin de l’année 2022. Lors de nos rondes dans les parcours du coin, beaucoup de gens nous parlent de Kisner, qui est définitivement un favori de la région. Astuce; lorsque la semaine du Masters se déroule, beaucoup de terrains privés de la région ouvrent leurs portes aux joueurs non-membres. Ceci est excellent à savoir car on y offre souvent des packages ‘membres d’un jour’ golf illimité avec le lunch inclus. On a donc profité de ce genre d’offre afin de jouer 36 trous au Reserve Club at Woodside Plantation, 2 magnifiques terrains.
Cette journée est particulièrement importante. À la fin de la journée, nous devons rencontrer une personne qui nous remettra les convoités ‘Patron’ ou en français, les billets du Masters! Nous décidons donc de prendre quelques bières et de manger au clubhouse du Reserve Club et lui donner rendez-vous à cet endroit. En prime, nous sommes jeudi et le Masters est à la télé. Quoi de mieux !?
On nomine Phil pour aller chercher les billets à l’entrée principale, car il est le chauffeur désigné. Il a également un excellent sens de l’orientation. On se dit donc que tout ira bien et que les billets seront récupérés en quelques minutes seulement. Alors on continue de regarder le golf pendant qu’il y va. 30 minutes s’écoulent, pas de Phil, pas de billets… Il revient et nous dit qu’il n’a pas retrouvé l’entrée. Il repart alors accompagné d’Alex, et reviennent finalement avec le billets en main, non pas sans un peu de sueur.
Arrêt #3 : Augusta National & Le Masters
De retour à Aiken billets en main et photos envoyées au propriétaire pour confirmer que l’échange s’est fait sans problème, on procède à la cérémonie tant attendue; l’horaire de visite du Masters. Pour vous expliquer rapidement, les billets du Masters permettent de sortir du site et rentrer une 2e fois par jour. Nous sommes 6 dans le groupe et nous avons les billets pour 3 jours, du vendredi au dimanche. En divisant les journées en deux, 4 personnes auront accès à Augusta National chaque jour. Il y a donc deux horaires, de l’ouverture du site à 7h jusqu’à 13h et de 13h à la fermeture du site aux alentours de 19h. Je fais parti du premier duo qui entrera sur le site vendredi matin en compagnie de mon ami de très longue date, Joe!
À ce moment, on a hâte. Tiger vient de jouer une première ronde de 71. On sent vraiment une énergie autour de son retour tant attendu à Augusta.
Le cadran sonne, mais je suis déjà habillé et prêt à partir. Je le suis en fait probablement depuis hier soir. Je n’ai pas beaucoup dormi mais j’ai de l’énergie à revendre. J’ai hâte de stationner l’auto et de passer la sécurité. Parlant de sécurité, ça ne niaise pas au Masters. Chiens renifleurs, police armée jusqu’aux dents, détecteur de métal, fouille de tous les sacs obligatoires et pour couronner le tout, aucuns appareils électroniques permis sur le site. Vous laissez ça dans l’auto. Et si on vous prend avec un appareil électronique sur le site, on vous retire votre Patron. Le propriétaire recevra une lettre et son privilège d’acheter les billets lui sera retiré. Marchez droits à Augusta, c’est pire qu’un aéroport!
On arrive finalement à l’entrée. Une file importante est déjà sur place. Les gens arrivent tôt pour 2 raisons.
La première est la boutique souvenir. Ce n’est pas compliqué, j’aurais tout acheté. Les souvenirs sont magnifiques, de qualité et à prix très raisonnables. Joe et moi ne sommes jamais allé, on ne sait pas trop sur quel pied danser mais comme les joueurs ne sont pas encore sur le terrain, on en profite pour aller à la boutique dès 7h du matin. Je mets quelques casquettes et polos dans mon panier et je vois un nain de jardin sur les étalages. Sans trop me poser de questions, je laisse passer ce souvenir pour lequel je ne vois pas d’intérêt. Première erreur commise, j’aurais dû prendre un nain. Les nains sont extrêmement prisés et se revendent à près de 10 fois le prix d’achat sur Ebay. Et malgré la valeur de revente, ils sont des souvenirs incroyables qui pourront décorer votre salon pour de longues années. Disons qu’après avoir compris, je n’ai pas refait la même erreur lorsque j’y suis retourné le lendemain matin.
La deuxième raison pour laquelle les gens arrivent tôt est pour aller y placer leur chaise. Au Masters, le respect est une valeur essentielle. Les gens sont autorisés à apporter leur chaise de camping et la placer à un endroit de leur choix aux abords du terrain. Une fois qu’on a déposé notre chaise, on a réservé notre place. Les autres spectateurs sont tenus de respecter ceci. Si les chaises ne sont pas utilisées par leur propriétaire, il est possible de s’y asseoir. Cependant, lorsque le propriétaire revient, il faut lui céder sa place. Assez extraordinaire comme façon de faire. Ce n’est pas partout qu’une telle règle non écrite serait respectée.
Après notre passage en boutique, un passage à 1000$, on a laissé nos achats en consigne au service gratuit de concierge. Ceci est ultra pratique pour ne pas les traîner sur le parcours et être encombré. Il est même possible de faire livrer la marchandise via UPS directement chez soi. Fantastique!
Il est environ 8h quand on prend la direction du terrain. Tiger ne joue qu’à environ midi trente, ce qui ne nous laissera pas beaucoup de temps pour le voir, malheureusement. On fait donc le choix logique d’aller voir Amen Corner avant que la foule s’installe. L’autre option était d’aller voir les joueurs se réchauffer au champ de pratique, cool mais pas autant que voir pour la première fois les trous mythiques du deuxième neuf. Chaire de poule au rendez-vous, je suis sous le choc. Le spectacle, même si aucun joueur n’est sur le parcours, est sublime. Ce qu’on voit à la télévision ne rend pas complètement hommage à Augusta. On ressent l’histoire, l’énergie que cet endroit dégage. Impressionnant !!! Nous sommes restés debout devant le vert du 11 et le départ du 12 à contempler le paysage pendant une dizaine, sans rien dire. Nous absorbions le moment.
On se ressaisi! Joe et moi continuons notre découverte du parcours et on s’arrête dans une concession. Les concessions sont les abris où on peut d’acheter un breuvage et un sandwich. La bière officielle du Masters et la Crows Nest. J’en prend une! Il n’est que 9h du matin mais je veux collectionner tous les verres de plastique à l’effigie du Masters. Une autre chose fascinante du Masters est le coût des boissons et de la bouffe. Un sandwich aux œufs est offert pour 1.50$. La bière est 5$. On a également d’autres sandwichs au poulet ou au jambon pour 3$. Bref, personne ne se ruine sur le site. La seule chose que je recommande est de rester le plus loin possible du sandwich officiel du Masters, le Pimento Cheese. Ceci est tout simplement affreux!
Il est 10h, les joueurs sont sur le parcours alors on prend la direction du premier neuf pour aller voir des gars qu’on veut absolument voir. Parmi la liste, Viktor Hovland, Dustin Johnson, Collin Morikawa et j’en passe. On s’installe brièvement au 2e trou pour regarder Hovland driver. Ensuite on s’installe entre le fairway du 2 et le tee off du 4, endroit particulièrement stratégique alors qu’il est possible depuis cet endroit de voir le 2e coup au 2 pour atteindre le vert en deux, les joueurs sur le vert du 2 et du 3 ainsi que les joueurs sur le départ du 4, une normale 3 monstrueusement difficile. En prime, une concession juste en bas du départ du 4 pour demeurer hydraté.
Quel spectacle, les joueurs frappent tous la balle de manière convaincante, on ne voit que très peu de mauvais coups mais il fait froid et le terrain est plus difficile qu’en temps normal. Les joueurs ne sont généralement pas habitués de jouer au froid. Les scores sont d’ailleurs anormalement élevés en cette édition 2022.
Le temps passe beaucoup trop vite, on regarde plusieurs groupes passer au tertre du 5e trou. Ce trou est particulièrement difficile, une normale 4 de 500 verges avec un vert des plus ondulé mais les gars ne semblent pas trop intimidés. On voit quand même Erik Van Rooyen commettre un double bogey en envoyant son 2e coup au-delà du vert dans une fosse de sable. Il fera 4 coups à partir de là, preuve qu’Augusta ne donne pas de chance lorsqu’on manque au mauvais ‘spots’.
En marchant vers le tertre du 8, qui est à coté du vert du 9, autre place de prédilection pour voir de l’action sur plusieurs trous en simultané, on observe qu’il y a beaucoup de monde autour du vert de pratique.
Joe me regarde en disant : ‘Ça doit être Tiger’.
Il est effectivement environ 40 minutes avant son départ, et ça ferait bien du sens que ce soit lui. Qui d’autre attire autant de gens autour du vert de pratique? On s’approche du vert et on confirme ce qu’on pensait, Tiger est sur le vert. Une foule immense encercle le vert. Tout le monde veut le voir. Il est -1 à ce moment dans le tournoi, une réelle chance existe qu’il puisse peut-être être dans le coup dimanche.
Il est déjà 13h et on doit quitter le parcours pour aller rejoindre nos amis qui attendent impatiemment d’entrer à leur tour. J’ai mon sac de souvenir bien rempli et une pile de 8 verres en plastique, je suis satisfait de ma performance du vendredi.
Partie 2 à suivre… avec un appel au 911 et John Daly